Maladies cardiovasculaires : la graisse n'est pas forcément un risque
news Il est habituel de penser que l’excès de graisse corporelle présente un risque pour la santé, en particulier sur le plan cardiovasculaire. Mais il s’avère qu’il n’en va peut-être pas forcément ainsi.
Pendant bien longtemps, le poids puis l’indice de masse corporelle (IMC : rapport taille - poids) ont été considérés comme des paramètres de référence pour estimer le risque cardiométabolique. Leur intérêt reste d’actualité, mais d’autres éléments tiennent une place importante dans cette évaluation. C’est le cas en particulier de la graisse abdominale (tour de taille). Dans ce contexte, on mentionnera aussi un sujet qui fait débat : le « paradoxe de l’obésité », suggérant que dans certains cas, l’obésité pourrait être associée à une espérance de vie plus longue. Cette thèse est (très) controversée tant un excès de poids important expose à de sérieux problèmes de santé.
Une équipe américaine (université de Californie) ajoute une nouvelle pièce au dossier. Elle a examiné des données concernant quelque 12.000 adultes suivis pendant près de deux décennies. Leur composition corporelle a été scannée par imagerie médicale (absorptiométrie biphotonique à rayon X), afin de déterminer la proportion de masse grasse et de masse musculaire. Quatre groupes ont été constitués.
• faible masse musculaire et faible masse grasse (groupe de référence)
• faible masse musculaire et masse grasse élevée
• masse musculaire élevée et faible masse grasse
• masse musculaire élevée et masse grasse élevée
Des différences entre hommes et femmes
Les chercheurs ont croisé ces données avec les cas d’événements cardiovasculaires, fatals ou non. Le résultat le plus surprenant concerne les femmes. Ainsi, celles qui présentent une masse musculaire et une masse grasse élevées s’exposent à un risque sensiblement réduit de décès par maladie cardiovasculaire (- 42% par rapport à une masse musculaire et une masse grasse faibles).
Plus surprenant encore : cette « protection » n’est pas constatée avec la même ampleur en cas de masse musculaire élevée et de masse grasse faible. Autrement dit, un taux relativement important de graisse serait bénéfique (paradoxe de l’obésité ?)… pour autant qu’il soit associé à une bonne composition musculaire. Dans le cas contraire (peu de muscles et beaucoup de graisse), la situation est très défavorable.
Concernant les hommes, les choses sont différentes. Le constat est le même que chez les femmes en cas de masse musculaire et de masse grasse élevées (- 36% de risque cardiovasculaire), mais la plus forte protection est associée à une masse musculaire élevée avec une masse grasse faible (- 60%).
Personnaliser l'approche
Les auteurs commentent : « Une masse musculaire élevée induit une baisse du risque de maladie et de mortalité d’origine cardiovasculaire tant chez les hommes que chez les femmes. Toutefois, chez celles-ci, et pour autant que la masse musculaire soit importante, un taux élevé de graisse semble associé à un risque plus faible de mortalité cardiovasculaire. Ces données soulignent l’importance de la masse musculaire en termes de prévention du risque cardiovasculaire, mais elles suggèrent aussi des différences entre les sexes concernant l’influence de la masse grasse sur ce risque ».
Comment interpréter cela ? Certainement pas en considérant que l’obésité ne pose pas de problème. Non : il s’agit d’un facteur de risque bien établi de maladie cardiovasculaire et métabolique (en particulier le diabète). Mais sans doute faudrait-il davantage personnaliser l’approche face à une personne en surpoids dont on évalue les facteurs de risque cardiovasculaire, et prendre en considération non seulement l’IMC et le tour de taille, mais aussi le rapport muscles - graisse et… le sexe. Les études à venir confirmeront ou non la pertinence du « paradoxe féminin ».
Voir aussi l'article : Graisse : il vaut mieux aux fesses et aux cuisses qu’au ventre