Leucémie : un cancer du sang

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La leucémie est un terme générique pour désigner certains cancers de la moelle osseuse. La maladie se caractérise par une prolifération anormale de différents types de globules blancs. De la moelle osseuse, la maladie passe ensuite dans le sang puis vers d'autres organes (ganglions lymphatiques, rate et foie). Tous les organes peuvent être touchés, y compris le système nerveux central.


Dysfonctionnement de la production des globules blancs

La moelle osseuse fabrique les cellules sanguines : les globules blancs, les globules rouges et les plaquettes. Ces cellules passent par plusieurs étapes de maturation dans la moelle osseuse : de la cellule souche à la jeune cellule blastique puis à la cellule mature qui passe finalement dans le sang. Les globules blancs jouent un rôle clé dans la lutte contre les agresseurs étrangers comme les bactéries, les virus ou encore les champignons. 

Comment les globules blancs agissent-ils ? Pour l’expliquer de manière très simplifiée, il existe différents types de globules blancs qui agissent de différentes façons contre les envahisseurs. Les lymphocytes reconnaissent l’agresseur puis produisent des anticorps qui le neutralisent ou l’attaquent. Les granulocytes responsables de la phagocytose attaquent de manière indifférenciée un certain nombre d’agresseurs en les avalant et les digérant. 

En cas de leucémie, il y a un dérèglement de la fabrication des globules blancs au niveau de la moelle osseuse. Les cellules de la moelle osseuse se multiplient à l’excès en raison d'un déraillement quelque part dans le processus de maturation. Ces cellules sont immatures (cellules blastiques) et ne sont donc pas en mesure de remplir leur fonction de défenseur contre les agressions. En augmentant de manière exponentielle, le nombre de globules blancs immatures compromet également la production de cellules sanguines normales. La carence en globules rouges entraîne notamment de l’anémie. Le sang ne peut plus transporter suffisamment d’oxygène ni de nutriments. Le manque de plaquettes entraîne une altération de la coagulation du sang et des saignements (thrombocytopénie).

Au départ, seule la moelle osseuse est touchée par ce trop plein de cellules sanguines immatures. Au fil du temps, ces cellules se répandent dans la circulation sanguine et donc dans les organes.

En fonction du type de globules blancs à l'origine de la maladie, on parle de leucémie lymphoïde ou de leucémie myéloïde. On distingue également la leucémie aiguë de la leucémie chronique.

Une accumulation rapide de cellules immatures provoque une leucémie aiguë alors qu’en cas de leucémie chronique, les cellules se sont développées un peu plus normalement. Le processus est alors plus lent.

La leucémie est le cancer le plus fréquent chez les enfants jusqu’à l’âge de 14 ans et il s’agit presque exclusivement de leucémie aiguë. Les garçons sont plus souvent touchés que les filles. Chez les adultes, la leucémie peut aussi bien être chronique ou aiguë.


Diagnostic de la leucémie

Si le médecin soupçonne une leucémie, il prescrit des examens ciblés. Dans un premier temps, une analyse de sang permettra de confirmer ou non la présence d’anomalies (comme plus de 10.000 lymphocytes par millimètre cube).

Une biopsie de la moelle osseuse permettra au pathologiste d’examiner les échantillons et de caractériser les cellules leucémiques. Les examens complémentaires comprennent notamment un examen sanguin approfondi, un examen de la coagulation, des reins et du foie, des radios des poumons, une échographie de l’abdomen et une ponction du liquide céphalo-rachidien.


Les causes de la leucémie

Les causes exactes de la leucémie sont relativement peu connues mais quelques facteurs peuvent avoir un impact sur son développement.

Facteurs environnementaux


On sait que l’exposition à de grandes quantités de rayons radioactifs accroît le risque de leucémie. Une radiothérapie antérieure constitue également un facteur de risque.  Les enfants exposés à des rayons avant ou après leur naissance présentent aussi un risque plus élevé de leucémie. Les opinions scientifiques divergent quant aux personnes qui habitent à proximité d’une centrale nucléaire.

Les milieux scientifiques sont tout aussi divisés quant aux risques encourus par les personnes vivant à proximité de lignes à haute tension.

Une longue ou massive exposition à certaines substances chimiques comme le benzène ou certains pesticides augmente également le risque de leucémie, de même que certains médicaments (cytostatiques) utilisés en chimiothérapie.

Virus


Il semblerait qu’un certain virus (virus de la leucémie à cellules T humaines) puisse déclencher une forme rare de leucémie.

Facteurs génétiques


Selon certaines indications, une prédisposition héréditaire peut avoir une influence sur le développement de certaines formes de leucémie. Essentiellement en cas de leucémie myéloïde chronique, les cellules cancéreuses contiennent presque toujours un chromosome anormal (le chromosome de Philadelphie). Une partie du chromosome a fusionné avec une autre.

On observe également un risque accru de certaines formes de leucémie chez les personnes atteintes du syndrome de Down et présentant des anomalies des mécanismes de réparation de l’ADN.

Voir aussi l'article : Des analyses génétiques pour prédire l'espérance de vie ?

Différentes sortes de leucémie

Lymphoïde ou myéloïde, aiguë ou chronique, il existe différentes formes de leucémie avec des pronostics variables et des traitements propres.

1- La leucémie lymphoïde aiguë (LLA)

Les cellules immatures qui prolifèrent sont celles qui auraient dû former des lymphocytes. Elles se répandent dans la moelle osseuse, le sang, les vaisseaux et les ganglions lymphatiques et peuvent pénétrer d’autres organes. De plus, elles supplantent les autres cellules sanguines normales. C’est la forme de cancer la plus courante chez les enfants de moins de 14 ans. 95% des enfants souffrant de leucémie sont atteints de la forme aiguë. L’occurrence de la leucémie aiguë est de 3 à 4 cas sur 100.000 enfants. 80% des petits patients ont la forme lymphoïde. La LLA apparaît surtout entre la deuxième et la troisième année de vie.

Symptômes de la leucémie lymphoïde aiguë

Au début, les symptômes de la LLA ressemblent à ceux d’une banale infection.

Les signaux d'alarme qui peuvent faire penser à une leucémie sont les suivants :

  • Pâleur
  • Fatigue inexplicable, essoufflement au moindre effort 
  • Infections à répétition
  • Fièvre
  • Douleurs osseuses
  • Gonflement des ganglions lymphatiques
  • Grossissement du foie et de la rate
  • Saignements spontanés (hématomes, saignements des gencives, du nez, règles trop abondantes…).

Cette catégorie de symptômes est provoquée par une carence de globules blancs, de globules rouges et de plaquettes.

Traitement

Le traitement de la LLA dépend du stade exacts de la maladie, du nombre de cellules anormales, des caractéristiques de ces cellules, de l’âge du patient, des anomalies spécifiques génétiques ou chromosomiques (par exemple le syndrome de Down, la présence d’un chromosome de Philadelphie…). Le traitement est en outre constamment revu en fonction des réactions du patient.

Une fois le diagnostic posé, le traitement commence le plus rapidement possible,

Actuellement, plus de la moitié des enfants souffrant de LLA guérissent s’ils bénéficient d’un traitement optimal. L’espérance de vie à 5 ans est d’environ 80% et de 70% à 10 ans.

Pronostic

Le pronostic est meilleur pour les filles et pour les enfants âgés entre 1 et 10 ans. Le pronostic vital des bébés de moins d’un an est très défavorable. Il dépend aussi du type de LLA et d’éventuelles anomalies génétiques ou chromosomiques.

Chez l’adulte, le pronostic varient entre 35 à 50% pour autant qu’ils se soumettent à un traitement optimal. Les chances de survie des patients de moins de 35 ans sont plus élevées. Les personnes souffrant d’un chromosome de Philadelphie (environ 20% des cas) ont un pronostic vital moins bon.

Le traitement peut avoir des conséquences à long terme : troubles de la croissance, des gonades, troubles du rythme cardiaque et changements neuropsychologiques. D’autres tumeurs peuvent apparaître, comme le cancer du testicule chez les garçons.


Voir aussi l'article : Cancers du système lymphatique : les lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens

2- La leucémie aiguë myéloïde (LAM)

Les cellules immatures qui prolifèrent sont ici destinées à la formation de granulocytes, de globules rouges (érythrocytes) ou de plaquettes (thrombocytes). On subdivise la LAM en 6 catégories en fonction du type de cellules en question.

La LAM est une maladie rare. Elle touche environ 1 à 2 patients par 100.000 habitants par an.

Contrairement à la LLA, la LAM touche essentiellement les personnes de plus de 60 ans.

Symptômes de la leucémie aiguë myéloïde


Au début, les symptômes de la LAM ressemblent à ceux d’une infection classique.
Les signaux d’alarme pouvant faire penser à la leucémie sont notamment :

  • Pâleur
  • Fatigue inexplicable, essoufflement au moindre effort 
  • Infections à répétition
  • Fièvre
  • Douleurs osseuses
  • Saignements spontanés (hématomes, saignements des gencives, du nez, règles trop abondantes…) 

On constate rarement un gonflement des ganglions lymphatiques ou un grossissement de la rate ou du foie dans le cas d’une LAM. Les symptômes sont dus à des carences en globules blancs et rouges et en plaquettes.

Pronostic


La rapidité du diagnostic et du traitement améliore considérablement le pronostic. Les chances de survie à 5 ans sont de 15% après un traitement adéquat. Le pronostic vital dépend notamment de l’âge, du type de LAM, du nombre de globules blancs, de l’étendue du cancer et de certaines anomalies génétiques ou chromosomiques.

3- La leucémie lymphoïde chronique (LLC)

Lors d’une LLC, ce sont les globules blancs matures (lymphocytes) qui prolifèrent de manière incontrôlée et qui vivent plus longtemps, détruisant les autres cellules sanguines. En cas de leucémie chronique, les cellules se sont développées plus normalement et le processus est plus lent. La maladie s’accompagne souvent d’un grossissement des ganglions lymphatiques et/ou de la rate.

C’est la forme la plus fréquente de cancer du sang chez les personnes de plus de 50 ans et le risque augmente avec l’âge. Ce cancer apparaît rarement avant l’âge de 40 ans. Il est deux fois plus fréquent chez les hommes que chez les femmes.


Symptômes


La leucémie chronique est une maladie insidieuse souvent dépourvue de symptômes au début. On ne la diagnostique parfois qu’à l’occasion d’un contrôle sanguin de routine.

Au fil du temps, les symptômes suivants peuvent se présenter :

  • Pâleur
  • Fatigue inexplicable, essoufflement au moindre effort 
  • Infections à répétition
  • Fièvre
  • Douleurs osseuses
  • Gonflement des ganglions lymphatiques
  • Grossissement du foie et de la rate
  • Saignements spontanés (hématomes, saignements des gencives, du nez, règles trop abondantes…).

Traitement


La leucémie chronique est habituellement incurable mais peut être maintenue sous contrôle, dans une certaine mesure. Elle peut être latente pendant des années sans qu’un traitement spécifique soit requis pour certains patients alors que d’autres ont besoin d’un traitement immédiat. Le système immunitaire étant affaibli, il est indispensable de bien traiter les infections. On prescrit parfois des traitements préventifs d’antibiotiques et/ou d’immunoglobulines pour prévenir toute infection. On peut également administrer des médicaments pour stimuler la coagulation.

Le traitement dépend de l’âge du patient, de son état général et surtout du stade de la maladie.  

Stade 0 : le sang compte trop de globules blancs sans autre symptôme. La rate et le foie ne sont pas gonflés. Le nombre de globules rouges et de plaquettes est normal. En fonction des circonstances, on peut décider de n’entamer aucun traitement mais plus le patient est jeune plus on sera enclin à le soumettre à une chimiothérapie. On suivra attentivement l’évolution de la maladie afin de pouvoir intervenir rapidement en cas de détérioration de l’état du patient.

Stade 1 : trop de globules blancs et gonflement des ganglions lymphatiques. La rate et le foie ne sont pas gonflés. Le nombre de globules rouges et de plaquettes est normal. Un ou plusieurs des traitements suivants : pas de traitement, chimiothérapie avec un ou plusieurs cytostatiques, avec ou sans corticostéroïdes, radiothérapie (pour les ganglions lymphatiques), anticorps monoclonaux (Alemtuzumab), transplantation autogène ou autologue de moelle osseuse ou de cellules souches.

Stade 2 : trop de globules blancs, gonflement des ganglions, de la rate et du foie. Un ou plusieurs des traitements suivants : pas de traitement, chimiothérapie avec ou sans cortisone, radiothérapie (ganglions et rate), anticorps monoclonaux (Alemtuzumab), transplantation autogène ou autologue de moelle osseuse ou de cellules souches.

Stade 3 : top de globules blancs, trop peu de globules rouges. Les ganglions lymphatiques, la rate et le foie sont généralement gonflés. Un ou plusieurs des traitements suivants : pas de traitement, chimiothérapie avec ou sans cortisone, radiothérapie (ganglions et rate), anticorps monoclonaux (Alemtuzumab), ablation de la rate, transplantation autogène ou autologue de moelle osseuse ou de cellules souches.

Stade 4 : trop de globules blancs, trop peu de plaquettes. Souvent trop peu de globules rouges et gonflement des ganglions lymphatiques, du foie et de la rate. Un ou plusieurs des traitements suivants : pas de traitement, chimiothérapie avec ou sans cortisone, radiothérapie (ganglions et rate), anticorps monoclonaux (Alemtuzumab), ablation de la rate, transplantation autogène ou autologue de moelle osseuse ou de cellules souches.




Voir aussi l'article : Cancers du système lymphatique : les lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens

4- La leucémie myéloïde chronique (LMC)

La LMC est provoquée par le développement et la prolifération des granulocytes. La production de granulocytes se dérègle essentiellement dans la moelle osseuse ainsi que dans le foie et la rate.

La LMC touche surtout les personnes âgées (plus de 60 ans) et un peu plus souvent les hommes que les femmes. Elle est rare chez les jeunes. Le taux de survie est en moyenne de 4 à 6 ans avec des cas extrêmes de moins d’un an ou de plus de 10 ans.

Cause


On détecte un chromosome anormal, le chromosome de Philadelphie, chez 95% des patients souffrant d’une LMC. Le chromosome de Philadelphie est le résultat d’un échange de matériel génétique entre les chromosomes 9 et 22. Les deux chromosomes cassent au milieu d’un gène. C’est le gène abl dans le cas du chromosome 9 et le gène bcr pour le chromosome 22. Ce déplacement entraîne une fusion, le gène bcr-abl, sur le chromosome 22. La protéine de fusion issue de ce gène est responsable de la multiplication et du développement anormal des globules blancs.
On constate la présence de ce chromosome de Philadelphie chez de nombreux patients atteints d’une leucémie myéloïde aiguë. Il augmente le risque d’issue fatale.

Symptômes

Au début, la LMC ne s’accompagne généralement pas de symptômes.

Au fil du temps, les symptômes suivants peuvent se manifester :

  • Pâleur
  • Fatigue inexplicable, essoufflement au moindre effort
  • Fièvre et sueurs nocturnes
  • Perte de poids et d’appétit
  • Forte dilatation de la rate, qui provoque une pression douloureuse dans le bas-ventre gauche
  • Saignements spontanés (hématomes, petits saignements sous-cutanés, saignements des gencives, du nez…)

Ce type de symptômes est provoqué par les carences en globules blancs et rouges ainsi qu’en plaquettes.

Dans une phase ultérieure de la maladie, le patient peut souffrir de douleurs osseuses et de fractures spontanées. Il est très exposé aux infections. Dans certains cas, on observe des renflements sous-cutanés, remplis de granulocytes anormaux.

Evolution


  1. Phase chronique : sa durée est variable mais est généralement de 5 à 6 ans.

  2. Phase d’accélération : la phase chronique est suivie d’une phase transitoire qu’on appelle phase d’accélération. Le nombre de globules blancs augmente fortement et on trouve de plus en plus de globules blancs immatures (blastes) dans le sang. Leur augmentation est provoquée par l’incapacité des cellules souches de la moelle osseuse à se transformer en globules blancs fonctionnels. A ce stade, le pourcentage de blastes ne cesse d’augmenter. Le taux de survie est en moyenne inférieur à un an.

  3. Phase blastique : on parle de crise blastique quand on détecte plus de 30% de blaste dans le sang. Le pronostic vital est très mauvais. A ce stade, l’espérance de vie du patient est de moins de 5 mois.

Traitement


La LMC requiert une transplantation allogénique de moelle osseuse ou de cellules souches. C’est le seul traitement curatif possible.

Cependant, la plupart des patients ne peuvent plus subir de transplantation en raison de leur âge trop avancé (on fixe en général la limite à 60 ans) ou faute de donneur adéquat. Plus la transplantation est rapide, plus les chances de survie sont élevées. On peut encore traiter la LMC par voie médicamenteuse. On peut aussi effectuer des transfusions de sang ou de plaquettes et de globules rouges ou filtrer les globules blancs.

Ces méthodes peuvent prolonger la vie du patient mais pas le guérir de la maladie. 

Voir aussi l'article : Don de cellules souches : quelle est la procédure ?



Dernière mise à jour: mars 2023

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