Ni sperme ni ovule : les premiers embryons de souris synthétiques posent des questions éthiques

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Des chercheurs sont parvenus à créer les tout premiers embryons de synthèse, à partir de cellules souches de souris. Cette prouesse donne lieu à de nombreuses questions, comme celle de savoir si, à l’avenir, des embryons synthétiques humains pourraient être utilisés dans le domaine de la transplantation d’organes.

Ni sperme ni ovule ni utérus. Des scientifiques de l’Institut Weizmann des sciences, en Israël, ont utilisé des cellules souches de souris pour générer des embryons synthétiques, ou « embryoïdes ». Placées dans une sorte d’utérus artificiel rotatif, les cellules souches étaient ainsi approvisionnées en nutriments, avec des conditions (oxygène et pression atmosphérique) essentielles à leur développement. Au terme de 8 jours, soit pas loin de la moitié de la durée de gestation de la souris (20 jours), les chercheurs ont constaté que les cellules s’étaient auto-assemblées en structures ressemblant à des embryons précoces avec un tractus intestinal, une ébauche de circulation sanguine, un cerveau primitif et un cœur qui bat.

Ces embryons n’étaient pas viables et inaptes à évoluer en fœtus. Ils ont d’ailleurs arrêté leur développement peu après ces 8 jours. "L'embryon est la meilleure machine à fabriquer des organes et la meilleure bio-imprimante 3D - nous avons essayé d'imiter ce qu'il fait", explique le professeur Jacob Hanna qui dirigeait l'équipe de recherche, dans un communiqué de l’institut Weizmann.

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Vers des embryons synthétiques humains ?

Ces embryons synthétiques permettraient de réduire l'utilisation d'embryons naturels d’animaux en laboratoire d'une part, mais surtout, ils pourraient être utiles à la recherche sur la différenciation cellulaire et la biotechnologie de la transplantation. "Notre prochain défi est de comprendre comment les cellules souches savent quoi faire - comment elles s'auto-assemblent en organes et trouvent leur chemin vers leurs points assignés à l'intérieur d'un embryon. Et parce que notre système, contrairement à un utérus, est transparent, il peut s'avérer utile pour modéliser les défauts de naissance et d'implantation des embryons humains », explique le Pr Hanna.

Les modèles d'embryons synthétiques pourraient – et là se posent les principales questions éthiques –  à l'avenir devenir une source de cellules, de tissus et d'organes pour la transplantation de tissus et d’organes. "Au lieu de mettre au point un protocole différent pour cultiver chaque type de cellules - par exemple, celles du rein ou du foie - nous pourrons peut-être un jour créer un modèle synthétique semblable à un embryon, puis isoler les cellules dont nous avons besoin. Nous n'aurons pas besoin de dicter aux organes émergents comment ils doivent se développer. C'est l'embryon lui-même qui s'en charge le mieux", ajoute le professeur.

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La vidéo ci-dessous montre un modèle synthétique d'embryon de souris au huitième jour de son développement. Il possède un cœur qui bat, un sac vitellin, un placenta et une circulation sanguine naissante. 

(Suite de l'article sous la vidéo)

Où se trouve la ligne

Malgré cette prouesse biotechnologique prometteuse, les embryoïdes pour pallier le don d’organes d’humains, ce n’est pas non plus pour demain, comme le rappelle le Dr James Briscoe, chercheur britannique (qui n’a pas participé à l’étude) pour le Guardian : "Les embryons humains synthétiques ne sont pas une perspective immédiate. Nous en savons moins sur les embryons humains que sur les embryons de souris et l'inefficacité des embryons synthétiques de souris suggère que la transposition des résultats à l'homme nécessite des développements supplémentaires."

En attendant, si des lignes directrices internationales existent (voir sources en bas de l'article), certains scientifiques rappellent la nécessité d’un cadre juridique et éthique et d’une mise à jour de la règlementation actuelle sur la recherche sur les cellules souches. "Il y aura toujours une zone grise", explique le professeur Paul Tesar, généticien, au site StatNews, "mais en tant que scientifiques et en tant que société, nous devons nous rassembler pour décider où se trouve la ligne et définir ce qui est éthiquement acceptable."

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Sources : 
www.cell.com
wis-wander.weizmann.ac.il
www.theguardian.com
www.isscr.org
www.statnews.com

auteur : Amélie Micoud - journaliste santé

Dernière mise à jour: août 2022

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