Ces accidents qui nous menacent à tout moment

dossier Un comportement routinier, un oubli stupide, une seconde de distraction… : la vie quotidienne est remplie de moments où l’on s’expose à un risque d’accident, avec des conséquences qui peuvent se révéler extrêmement graves. Et cela se produit souvent dans un environnement familier et quand on s’y attend le moins. Sans sombrer dans la paranoïa, comment limiter autant que possible le danger ?

Le Dr Gérald Kierzek est anesthésiste, réanimateur et urgentiste à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, ainsi qu’expert auprès des tribunaux. « Je mesure chaque jour combien un accident est vite arrivé », explique-t-il dans l’avant-propos de son livre « 101 conseils pour ne pas atterrir aux urgences » (Ed. Robert Laffont). Un ouvrage parsemé de très nombreuses recommandations pratiques et qui se parcourt avec curiosité et intérêt (et même un réel plaisir, voire parfois un sourire, ce qui peut sembler paradoxal vu le contexte).

« Depuis que je travaille aux urgences, je n’essuie jamais la vaisselle en tournant à l’intérieur d’un verre, je ne descends pas les escaliers les mains dans les poches ou en écrivant un texto, je ne parle pas la bouche pleine (surtout avec du lapin et du poisson et pas seulement pour des raisons de politesse !) ou je ne rase pas les murs lors d’une journée venteuse », poursuit le Dr Kierzek. Ajoutant que « d’habitude, je donne ces conseils à la fin de la consultation aux urgences ».

Nous avons retenu dix situations à risque afin d’illustrer combien le danger guette à chaque moment.

Pieds nus ou pantoufles ?

Hormis dans la salle de bains (et encore…), marcher pieds nus à la maison est une très mauvaise idée. Il faut au minimum porter des chaussettes ou, bien mieux, des pantoufles.

« Vous avez oublié le verre brisé la semaine dernière ? Le morceau resté au sol n’attend qu’un pied nu pour se rappeler à votre souvenir », d’autant que les débris ont une fâcheuse tendance à s’éparpiller et à se dissimuler dans les moindres recoins. Ces pantoufles protégeront aussi du couteau, ou de tout autre objet contondant ou piquant, qui glisse des mains et vient se planter dans la peau.

Aucun revêtement n’est sécurisant : pensons en particulier au bois du parquet et à ses redoutables échardes.

Les jeux sexuels

Pour provoquer le grand frisson, certains pratiquent une puissante insufflation dans le vagin de leur partenaire : ce jeu sexuel peut parfois se compliquer d’un pneumopéritoine (entrée d'air dans la cavité de l'abdomen) et conduire à une intervention chirurgicale… pour rien. Les douleurs au ventre, le principal symptôme, peuvent en effet faire redouter une perforation intestinale ou une occlusion, sachant que la radiographie va accentuer les craintes (en confirmant la présence d’air dans le ventre). Une opération dite « exploratrice » pourrait alors être réalisée. Or, il aurait suffi d’attendre que l’air se résorbe spontanément (attention cependant aux risques d’embolie, qui ne menacent cependant que la femme enceinte).

Moralité : il ne faut jamais se montrer trop pudique et il est nécessaire de parler ouvertement avec le médecin. Et cette franchise concerne aussi les situations où un corps étranger est introduit par voie vaginale ou rectale. Les explications invoquées peuvent être pour le moins curieuses : « Je me suis assis dans le frigo », « J’ai glissé dans une cagette de concombres », « La bouteille traînait dans mon lit », et tout cela alors que l’on était nu, forcément. Inutile de se torturer l’esprit : les urgentistes ne sont pas là pour juger.

En tout état de cause, il vaut mieux ne rien introduire dans ses orifices naturels, et ajoute avec humour le Dr Kierzek, « suivez attentivement le manuel d’utilisation des objets et ne les détournez pas de leur usage ».

Ne parlez pas la bouche pleine

Pour quelle raison ? Par politesse, mais aussi pour prévenir la fausse route, avec un risque d’obstruction et d’étouffement en raison du passage d’un aliment dans les voies respiratoires. Certains présentent plus de dangers que d’autres. Il en va ainsi du lapin (petits os), du poisson (arêtes) ou du mille-feuilles.

Ne jamais parler en mangeant, prendre le temps de bien mâcher et couper sa viande en petits morceaux avant de l’avaler : trois précautions simples pour éviter de sérieux désagréments.

Se baigner après avoir mangé

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La consigne est ancestrale : il ne faut jamais plonger dans l’eau peu de temps après avoir fini de manger. Pourquoi ? Cela n'a rien à voir avec la digestion proprement dite. Mais le repas a provoqué une augmentation de la température corporelle et le contact avec l’eau (très) froide risque de déclencher un choc thermique (hydrocution), avec une issue potentiellement mortelle.

Combien de temps faut-il attendre ? Tout dépend de ce que l’on a mangé (la quantité et le type d’aliments et la consommation éventuelle d’alcool), ainsi que des conditions ambiantes (la chaleur et l’exposition au soleil augmentent le risque).

Le conseil clé, c'est d’entrer dans l’eau progressivement, en se mouillant d’abord les poignets, le visage et la nuque, et ceci d'ailleurs que l'on vienne ou non de manger.

Bloqué dans l’ascenseur

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Pour un claustrophobe, l’expérience vire rapidement au cauchemar, pour ceux qui ne le sont pas, elle suscite – à tout le moins – un réel sentiment d’inquiétude : quand on est coincé dans un ascenseur immobilisé, il est essentiel de ne pas céder à la panique et de se retenir de vouloir sortir le plus vite possible, coûte que coûte.

Si l’ascenseur s’est arrêté à mi-étage, que la porte s’entrouvre et qu’un espace libre laisse penser que l’on peut s’extraire, c’est un scénario catastrophe qui se dessine : imaginez que l’ascenseur redémarre au moment même où une moitié de votre corps est dans la cabine et l’autre à l’extérieur… Message : c’est dans la cabine que l’on est le plus en sécurité. On respire calmement et on actionne la sonnette d’alarme.

La sortie ne se fera que sur instruction des secours ou de l’équipe technique (qui auront au préalable sécurisé l’installation, en particulier pour prévenir un redémarrage impromptu). Les non-professionnels qui assisteraient à la scène avant l’arrivée des secours doivent se contenter de rassurer les personnes bloquées et ne jamais tenter de se glisser dans l’ascenseur ou d’essayer d’aider les occupants à en sortir.

Les couteaux dans le lave-vaisselle

« J’ai froid dans le dos quand je repense à cette petite fille de 4 ans qui s’est blessée en tombant sur trois couteaux, lames vers le haut, et s’est retrouvée avec trois plaies par arme blanche à l’abdomen et au thorax », confie le Dr Kierzek. L’état de santé de l’enfant a évolué favorablement. Néanmoins, il est certain que lorsque ses parents placeront les couteaux dans le lave-vaisselle, ils s’assureront que la lame soit orientée vers le bas, et que la porte aura été bien refermée.

« Nombre de consultations aux urgences et d’interventions chirurgicales pourraient être évitées si ce simple conseil de prudence était respecté ». Couteaux, fourchettes, piques en tout genre : ces objets doivent toujours être glissés dans le lave-vaisselle tête vers le bas. Les pointes menacent la paume de la main des adultes et des enfants, et en cas de chute accidentelle, peuvent causer de très graves blessures.

Eternuer sans se retenir

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Contenir un éternuement est une erreur. Pour dissimuler le bruit et éviter les projections, la tentation est grande de se pincer le nez et de bloquer cet « orgasme cérébral », comme le qualifie le Dr Kierzek. Or, trois conséquences sont à craindre.

Si la pression de l’air se propage vers l’oreille interne et les tympans, cela peut provoquer au minimum une douleur et au pire une lésion (perforation tympanique, notamment).
• L’autre risque – théorique mais plausible – porte sur une majoration d’anévrisme, qui peut aller jusqu'à sa rupture. En fait, l’éternuement nez pincé risque d’aggraver la situation.
• Enfin, il y a le pneumothorax, un « décollement » du poumon qui va s’affaisser dans le thorax et entraîner des (gros) troubles respiratoires.

Le conseil donc : ne pas bloquer un éternuement où moment de l’éjection de l’air. Il est nécessaire de consulter en urgence en cas de douleur à l’oreille, de baisse de l’audition, de douleur à la poitrine ou de maux de tête violents.

Ne pas pencher la tête vers l’arrière quand on saigne du nez

C’est un réflexe classique et une très mauvaise idée. Pour deux raisons : on ne sait pas vérifier si le saignement s’est arrêté ou s’il prend de l’ampleur, et en cas de saignement important, la fausse route menace, en particulier (mais pas seulement) chez la personne âgée ou fragilisée : lorsque le sang ne peut plus être dégluti, il risque de se retrouver dans les voies respiratoires et passer dans les poumons.

Les bons gestes

• se mettre au calme
• s’asseoir (ou se placer en position mi-assise) tête fléchie vers l’avant
• se moucher pour éliminer le premier caillot sanguin (qui n’a aucune efficacité et ne permet pas d’arrêter le saignement)
• comprimer la narine qui saigne

Dans la plupart des cas, cela permet de stopper un saignement modéré. Un tampon hémostatique peut être utile pour favoriser l’arrêt. Attention : en cas de saignement du nez suite à un coup sur la tête, il est crucial de s’adresser à un médecin, dans la mesure où cela pourrait indiquer un traumatisme crânien grave.

Pas de coton-tige dans les oreilles

« C’est l’exemple type du conseil d’hygiène mal expliqué », souligne le Dr Gérald Kierzek. Le coton-tige a conduit pas mal de personnes aux urgences. « L’accident le plus bête, qui se produit souvent quand on est pressé, c’est de laisser le coton-tige dans l’oreille et de commencer à faire autre chose, comme par exemple se sécher les cheveux. Conséquence : un mauvais mouvement vous fait heurter le coton-tige qui s’enfonce trop profondément dans l’oreille ». Le tympan peut être perforé ou le conduit auditif lésé.

Autres conséquences possibles : le coton-tige pousse un bouchon de cérumen au lieu d’aider à l’évacuer, ou la ouate se détache et reste bloquée dans le conduit auditif. La meilleure manière de se nettoyer les oreilles consiste à utiliser un jet d’eau (la douche) et ensuite d’essuyer avec une petite mèche de coton ou avec un mouchoir. Idéalement, il ne faut rien glisser dans le conduit auditif et surtout ne jamais enfoncer le coton-tige dans l’oreille et le laisser en place, même pour quelques secondes.

Le piège du robinet

Ce n’est pas à proprement parler une cause d’admission aux urgences, mais en matière d’hygiène, cette situation doit donner à réfléchir.

Se laver les mains à plusieurs reprises pendant la journée est évidemment un comportement important, qui doit d’ailleurs intervenir systématiquement dans une série de situations : après avoir été aux toilettes, après une sortie à l’extérieur, avant de préparer un repas ou de passer à table, après s’être mouché, en cas de contact avec une personne malade…

Et que fait-on ? On se nettoie bien les mains à l’eau et au savon, on rince, on ferme le robinet et on sèche, avec la satisfaction du devoir accompli. Sauf que procéder de cette manière ne sert pas à grand-chose. En effet, au moment d’ouvrir l’eau, une quantité astronomique de microbes s'est déposée sur le robinet : se laver les mains puis les remettre immédiatement en contact avec les germes n’a pas beaucoup d’intérêt.

Alors ? Il faut s’essuyer les mains avant de couper l’eau, puis fermer le robinet avec l’essuie-main (ou avec le coude s’il s’agit d’un mitigeur). De cette manière, le lavage aura atteint son objectif.

Source: Dr Gérald Kierzek – 101 conseils pour ne pas atterrir aux urgences – Editions Robert Laffont

Dernière mise à jour: août 2015

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